Wanted
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- Critique par Nicolas Zugasti le 29 juillet 2008
Prends-toi en main, c'est ton destin !
S’il est loin d’être un film d’action qui révolutionnera le genre, Wanted n’est pas non plus une purge sans nom. En tout cas, il lance parfaitement la carrière hollywoodienne de Bekmambetov, le plus américain des réalisateurs russes.
Son pour l’instant diptyque Nightwatch/Daywatch (on attend le troisième avec une infinie patience) était un véritable appel du pied, soumettant des romans à succès à la saturation d’effets et de références aux blockbusters américains. Hollywood et Bekmambetov étaient donc faits pour se rencontrer. C’est donc chose faite avec Wanted, adaptation d’un comics "indépendant" (non publié par la Marvel ou DC) de Mark Millar et J.G. Jones, ouvertement provocateur, iconoclaste et délirant. Dépeignant un monde où les super-vilains ont pris le pouvoir à l’insu de tous, tuant les super-héros, allant même jusqu’à effacer leur souvenir des mémoires, et qui conte l’apprentissage de Wesley Gibson pour devenir le plus grand bad mother fucker.
Pas de contexte superhéroïque, sûrement dû à un budget serré, mais une secte de tueur obéissant à un métier à tisser le destin. Ouch, premier uppercut provenant des scénaristesMichael Brandt et Derek Haas, responsables de 2 Fast 2 Furious, associés ici à Chris Morgan (scénario de Fast And Furious : Tokyo Drift). Heureusement, Bekmambetov relève quelque peu le niveau grâce à une réalisation aussi énergique, à défaut d’être inventive, qu’ostentatoire. Une constance qui force le respect. Cascades, poursuites, gunfights : tout est démesuré, retrouvant par moments une folie digne du comic. Forçant peu sa nature pour se conformer aux standards actuels du film d’action hollywoodien, il use et abuse des ralentis pour nous montrer le parcours d’une balle perforant une boîte crânienne, effectuant une courbe pour éviter un obstacle ou incisant les ailes de mouches. Et à ceux qui dénoncent un effet bullet time à chaque fois qu’un film nous montre un personnage ou une balle se mouvant au ralenti, rappelons que le bullet time permet de voir une action au ralenti certes mais surtout de permettre à la caméra d’effectuer un mouvement (de 360 degrés ou moins) autour du sujet filmé (pour les détails techniques voir John Gaeta ou nicco).
Dommage qu’en plus de seconds couteaux pas très impliqués ou de personnages secondaires (Morgan Freeman) en faisant le minimum, la bad-ass attitude inhérente au sujet ait été passablement édulcorée. Ce sont des tueurs oui, mais pas méchants. Ils permettent de maintenir l’équilibre en butant des mauvaises personnes désignées, il faut le rappeler, par un métier à tisser. Pas méchants mais un peu neuneu quand même pour obéir aveuglément à quelques mailles de fil. Produit tout public oblige, les dilemmes moraux de Wesley Gibson seront assez vite expédiés. Ne subsistera qu’une intrigue assez simpliste et linéaire sans grande surprise. Cependant, quelques séquences retiendront l’attention des spectateurs les plus pervers. La programmation de Wesley à coups de poing dans la tronche, de tailladage au couteau et de régénération détonne clairement. A retenir également la technique du gun-kata empolyée par Gibson (notamment lors de l’explosif assaut final), vu pour la première fois dans L’Art De La Guerre de Christian Dugay et élevée au rang d’art par Kurt Wimmer dans Equilibrium, technique de combat rapproché avec des pistolets, où les flingues deviennent le prolongement du guerrier.
Au final, Angelina est très jolie, James McAvoy est plutôt crédible dans son rôle de loser et les scènes d’action sont dynamiques, assez lisibles et jouissivement bis, mais après ? Wanted demeure sympathique à bien des égards mais reste cantonné à la catégorie des "vite vu, vite oublié". Sauf que…
Sauf que, on peut considérer que Wanted perpétue la décadence du film d’action entamée par Michael Bay et son Bad Boys II pour l’élever au rang de concept extrême. Non content de verser sans états d’âmes dans les effets de styles aussi racoleurs que parfois décérébrés, Wanted se pare d’un nihilisme post Fight Club (Wesley tyrannisé au boulot, trompé par sa copine et qui envoie tout le monde se faire foutre en devenant un putain de tueur) uniquement pour donner un semblant de profondeur à un pop-corn movie. Bon, là je m’avance peut être un petit peu.
Néanmoins, si Wanted reste un spectacle agréable, le film aurait sans doute gagné à verser dans le délire décomplexé du comic, en montrant les tueurs dominer le monde après avoir éliminé les héros de cinéma tels McClane (ah pour celui là , la Fox s’en est chargé l’été dernier), Dirty Harry, Rambo, etc., conservant leurs reliques (un marcel, un magnum 357, un bandeau) en souvenir. Wesley Gibson embrassant ainsi la carrière de tueur non plus pour déterminer qui il est mais parce qu’il peut tuer en toute impunité. Un traitement risqué que l’on est pas prêt de voir appliquer.
Comme souvent avec ces adaptations de comics, le mieux est encore de les lire.
WANTED
Réalisateur : Timur Bekmambetov
Scénario : Michael Brandt, Derek Haas, Chris Morgan, d’après le comic créé par Mark Millar et dessiné par J.G. Jones
Production : Sally French, Jim Lemley, Mark Silvestri…..
Photo : Mitchell Amundsen
Montage : David Brenner, Dallas Puett
Bande originale : Danny Elfman
Origine : USA
Durée : 1h40
Sortie française : 16 juillet 2008