The People Vs. George Lucas
L'Empire avec le temps
La note d’intention de The People Vs. George Lucas propose d’analyser la saga la plus mythique du cinéma et ses dérives à travers le portrait de George Lucas, tissé par ses anciens collaborateurs ou par des journalistes et mis en exergue par des témoignages de fans recueillis par le Net à travers le monde.
TPVsGL s’organise à la manière d’une tragédie, en trois actes d’une demi-heure chacun suivant la chronologie de la conception du mythe Star Wars, et sa résonance particulière avec la vie de son principal créateur. Â
EXPOSITION / PIVOT / RÉSOLUTION
La première partie, après un bref retour sur l’enfance de Lucas et l’accident de voiture à l’origine de sa vocation cinématographique, relate les évènements largement commentés sur le début de carrière du jeune George, à l’époque de la fac et de sa rencontre avec Francis Ford Coppola (et plus généralement du noyau de camarades qui constitue son entourage, à l’origine du Nouvel Hollywood).La production chaotique puis l’accueil de Star Wars sont les points d’orgue de l’exposition, qui témoigne de l’ampleur exceptionnelle de la saga. Un climax émotionnel qui semble faciliter la compréhension du phénomène Star Wars chez le spectateur n‘ayant pas connu la sortie du film, afin de mieux l’analyser.
Le pivot du film passera directement par la nouvelle trilogie et l’égarement de Lucas sans approfondir les événements qui ont poussé le cinéaste à s’enfermer dans sa tour d’ivoire et à remercier la plupart de ses collaborateurs, et en premier lieu Gary Kurtz. Cette partie ne sera malheureusement qu’un prétexte à un déferlement de rancÅ“ur répétitif et stérile. Si ce déferlement était aussi nécessaire que de montrer l’amour des cinéphiles pour Lucas, l’émotion est ici beaucoup moins bien gérée. Cette haine ne sera remise en question que par les interventions élogieuses de deux universitaires français, dont Pierre Berthomieu, notamment autour de... Jar jar Binks ! Â
La dernière partie, où l’analyse de la substance de Star Wars est attendue logiquement en résolution du film, ne viendra malheureusement jamais. Le dernier acte se limite à un happy end peu inspiré, où l’ensemble des fans clament leur amour pour Lucas, malgré toute la haine qu’ils viennent de balancer impitoyablement devant leurs webcams. Â
LA FORCE
TPVsGL oublie donc de parler de l’essentiel (Joseph Campbell n’est jamais évoqué), qui a pourtant été abordé lors du tournage par quelques intervenants (Gary Kurtz et le critique français Rafik Djoumi) : pourquoi George Lucas est-il tombé du côté obscur de la Force (voir l’interview d’Alexandre O. Philippe), et surtout quelle est la nature cette Force ?
La réception inédite de la saga par le public touche au sacré (ce que Francis Ford Coppola a explicité à son ami) et l’action démiurgique de Lucas envers son œuvre au mépris de ses fans, et la révolte de ses derniers, rappellent certains schémas de croyance religieuses.
Le cinéma, art narratif le plus puissant et le plus populaire à la sortie du film, a trouvé avec Star Wars la fusion la plus subtile du mythe (Narration) et de sa représentation (Art). Un alliage qui ramena (et ramène encore) dans les salles ou devant leurs écrans des générations d’adeptes, afin de revivre de manière rituelle l'expérience Star Wars.
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THE PEOPLE VS. GEORGE LUCAS
Réalisateur : Alexandre O. Philippe
Production : Vanessa Philippe, Anna Higgs…
Photo : Robert Muratore
Montage : Chad Herschberger
Bande originale : Jon Hegel
Origine : USA / GB
Durée : 1h33
Sortie française : non