Control
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- Critique par Nicolas Bonci le 28 septembre 2007
Le môme
Ian Curtis n'est pas mort. Il est en coloc quelque part aux Bermudes avec Lennon, Joplin, le King et Morrison. Si, si. Ce qui ne nous empêche pas de mesurer l'importance d'un biopic sur l'une des étoiles fulgurantes de la musique (mais nous ne somme pas dupes, il est vivant).
A la recherche d'un certain crédit en tant que réalisateur de cinéma, le clippeur Anton Corbijn opte pour une approche sobre et minimaliste de la vie de Curtis et la création de Joy D. Le parti pris, très bien exécuté, est suffisamment cohérent avec le sujet pour se poser en parfait complément du 24 Hour Party People de Winterbottom. En effet, si le métrage électrique et joyeusement bordélique du réalisateur d'Un Cœur Invaincu abordait l'histoire globale d'un courant et la genèse d'une culture, le film de Corbijn se concentre posément sur une des figures de cette culture, indiquant même dès les premières séquences musicales coupées abruptement que le sujet de Control est avant tout Curtis, et non son groupe ou sa musique.
Un Curtis rongé par la maladie, puis par le remord, celui d'avoir blessér une femme qu'il ne déteste pas mais avec qui il s'est marié trop vite, trop tôt, le frustrant dans son désir de contrôler sa vie et ses envies. Pris au piège d'une existence d'adulte et de père de famille, conscient de son manque de courage face aux problèmes (il éclate en sanglots au lit avec sa femme, honteux de lui cacher la vérité), Curtis n'a que ses paroles pour relâcher la pression, ses compositions semblant naître d'elles-mêmes par le biais d'une utilisation simple mais efficace de la discographie du groupe, qui ne sert non pas aux scènes habituelles et imposées du biopic musical (montrant par exemple la création d'un tube mythique) car faisant ici office d'illustration des moments clés qui pourraient être à l'origine de leur création (la première apparition de Love Will Tear Us Appart est extrêmement poignante).
Evitant le strass et la success story pour mieux souligner noir sur blanc le contexte de l'époque (no future), Corbijn découpe au cordeau le désenchantement d'un diamant brut désinvolte et angoissé, sans en appuyer la tragédie (la première tentative de suicide seulement esquissée par une lettre ambiguë, le quiproquo né du nom du groupe illustré par des skin' disséminés dans le public…). Tout comme il ne lui suffira que d'un plan des membres de Joy Division après le décès de Curtis, silencieux, abasourdis, réunis autour d'une pinte, pour saisir l'importance de l'héritage dont ils sont responsables.
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Réalisateur : Anton Corbijn
Scénario : Deborah Curtis & Matt Greenhalgh
Production : Anton Corbijn, Orian Williams, Todd Eckert…
Photo : Martin Ruhe
Montage : Andrew Hulme
Bande originale : Joy Division & New Order
Origine : GB / USA
Durée : 2h01
Sortie française : 26 septembre 2007
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