L'Apollonide (Souvenirs De La Maison Close)

Au bord d'elles

Affiche L'Apollonide (Souvenirs De La Maison Close)
[Article publié dans le cadre de "La semaine normale"] Pour son cinquième film Bertrand Bonello revisite encore une fois le thème de la chair. Avec L'Apollonide, le cinéaste nous fait entrer dans les alcôves d'une maison close parisienne au début du siècle dernier.
On y croise une prostituée défigurée par une cicatrice, qui se voit ainsi contrainte, douce ironie, d'afficher un sourire tragique. Cette image forte porte toute l'ambition du projet, montrer le beau et le monstrueux, le désirable et l'inavouable, la contrainte et le plaisir.

Film sur le fantasme,
L'Apollonide fait frétiller devant nos yeux voyeurs la décrépitude des émotions qui y sont adjacentes : les rivalités, les craintes, les joies, l'assouvissement et la révolte. Et surtout le secret. Une atmosphère enrobe alors l'enluminure de Bonello d'une pictographie cotonneuse, se faisant aussi attirante pour qui souhaite s'y plonger qu'effroyable. On pense à la séquence du gynécologue obligeant les filles à ouvrir leurs cuisses pour la révision des 10 000, et apparaissant comme du vulgaire bétail.

L'Apollonide (Souvenirs De La Maison Close)

Cette épopée duveteuse, parvient, sous la caméra discrète de l'auteur du
Pornographe, à se faire aussi espiègle (quelques anachronismes voulus) que débauchée, sans pour autant porter un jugement sur ses personnages. C'est au spectateur de se laisser convaincre s'il doit faire un parallèle avec la condition des femmes aujourd'hui, et nous sommes en cela loin de la Maison Close de Canal +.
Citant ouvertement la peinture de l'époque (on n'est par moment pas loin d'un Peter Greenaway), Bonello tisse un lien étroit entre les différentes sources de plaisirs, qui restent aussi et surtout sources d'épanouissement, quels qu'ils soient. Loin d'attendrir le destin de ses femmes, le procédé leur donne un caractère pirandellien, intemporel, et en conséquence un peu froid.

C'est ce que l'on pourra reprocher à cet obscur objet du désir, qui trop désireux de juste effleurer la tragédie en sourdine de ces lieux d'une époque révolue, ne parvient que trop rarement à devenir un objet de son temps.

6/10
L'APOLLONIDE (CHRONIQUES DE LA MAISON CLOSE)

Réalisateur : Bertrand Bonello
Scénario : Bertrand Bonello
Production : Bertrand Bonello & Kristina Larsen
Photo : Josée Deshaies
Montage : Fabrice Rouaud
Origine : France
Durée : 2h02
Sortie française : 21 septembre 2011

 




   

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